Cognition et clairvoyance
"Un devin, qu'est-ce? Un homme qui mêle à beaucoup de mensonges quelques vérités, quand il a de la chance!"
Bienvenue sur IA Pulse Weekend. En vous abonnant, vous recevez tous les samedis matin, l’essentiel de ce qu’il s’est passé cette semaine autour de l’IA : un coup de gueule édito, une sélection de 3 articles avec pour chacun un résumé rapide à lire, plus 1 article de fond pour ouvrir l’esprit et réfléchir, et pour finir 1 podcast à écouter.
⏱️Temps de lecture de cette newsletter par une unité carbone : 9 mins
Cette semaine le Parlement européen a adopté l’IA Act. En France, la Commission sur l’intelligence artificielle a rendu son rapport au Président de la République. Nous sommes un coin du monde où ça bouge. Non ?
Je ne vais pas revenir sur les détails de ce rapport, certains l’ont fait, et le font encore ce matin, beaucoup mieux que moi. J’en profite juste pour rappeler quelques éléments. En France depuis 2019, nous sommes dans les 5 premiers mondiaux dans le classement des investissements de capital-risque dans l’IA générative. Nous avons actuellement, à côté des fleurons technologiques et médiatiques comme Mistral AI par exemple, des dizaines d’entreprises travaillant sur ces technologies qui vont des LLM aux modèles de génération d’images, de sons et de vidéos. Je pourrais citer LightOn, NLP Cloud, Photoroom, Argil, etc. Que dire aussi de nos chercheurs, de nos ingénieurs, et de toutes les entreprises petites ou grandes qui intègrent ces technologies. Et je ne parle même pas de l’IA “canal historique”, celle qui était déjà présente partout avant le sortie de ChatGPT.
C’est bien de nous montrer le chemin qu’il reste à parcourir, de nous indiquer les points d’amélioration - comme on dit en langage managérial, mais c’est aussi bien de reconnaitre que nous sommes très loin d’être déclassés. Nous ne sommes pas des médiocres.
Sans transition, de l’autre côté de l’Atlantique on voit arriver cette semaine Devin, un outil permettant d’automatiser les développements informatiques. Pas encore à la hauteur des développeurs humains, cet outil nous montre peut-être une partie de notre avenir. Quasiment au même moment le Wall Street Journal publie une interview de la CTO d’OpenAI au sujet Sora, l’outil text-to-video ultra réaliste. Une autre partie de notre probable avenir. On termine sur une étude d’App Radar autour des chatbots compagnons et du marché des petites amies et petits amis virtuels. Quelle belle vision de l’avenir.
Pour réfléchir, on reste dans ce dernier thème avec un article du Figaro sur le filon de ces chatbots compagnons exploités cotés business, entre autres, par Character(.)ai, et l’engouement des humains pour ce type relation plus ou moins intime.
Cette semaine la partie de cette newsletter gérée par l’IA, les 3 premiers résumés d’articles, a été générée par GPT-4 Turbo. Comme d’habitude trop souvent j’ai fait quelques modifications, mais j’ai aussi laissé quelques tournures typiques des modèles de langage. Et bien entendu, mes commentaires éventuels sont en italique dans ces résumés. Le texte de “l’article qui fait réfléchir” est issu d’un ping-pong entre Claude 3 - Opus et votre serviteur. L’image d’illustration ci-dessous est générée par Midjourney.
📰 Les 3 infos de la semaine
🤓 Startup unveils “world’s first” complete AI software engineer
Freethink, 14/3/2024
Cognition, une startup spécialisée en IA et financée par des investisseurs de renom comme Peter Thiel, a lancé un nouveau logiciel d'ingénierie nommé Devin. Contrairement aux assistants de codage existants, Devin est capable de gérer de bout en bout les projets de développement, incluant la rédaction de code, la correction de bugs et l'exécution finale - mais il est encore loin pour le moment d’égaler les compétences d’un développeur humain.
La sortie de Devin marque un tournant dans le domaine de l'assistance au développement par IA, offrant aux ingénieurs un membre d'équipe IA complètement autonome plutôt qu'un simple assistant pour des extraits de code. L'accès à Devin est actuellement réservé à un nombre restreint d'utilisateurs.
Devin fonctionne dans un environnement cloisonné et utilise des outils de développement pour effectuer des tâches complexes à partir de directives en langage naturel. Il permet un suivi en temps réel du projet et les utilisateurs peuvent intervenir via une interface de chat pour corriger les erreurs.
Devin s'est montré compétent dans diverses tâches, dépassant d'autres modèles d'IA en résolvant un pourcentage supérieur de problèmes sur des projets GitHub réels sans aide humaine - c’est bien mieux que les autres outils, mais il n’en résout encore que 13,80%.
Cognition n'a pas révélé la technologie sous-jacente de Devin mais mentionne que le produit est le résultat de progrès dans le raisonnement et la planification à long terme. La startup, qui envisage d'étendre son offre à d'autres métiers, a jusqu'ici levé 21 millions de dollars.
🎞️ OpenAI Made AI Videos for Us. These Clips Are Good Enough to Freak Us Out.
The Wall Street Journal, 13/3/2024
Il y a une dizaine de jours OpenAI a dévoilé Sora, un nouvel outil d'intelligence artificielle qui génère des vidéos à partir de textes. Interrogée par le Wall Street Journal, la CTO de l'entreprise - et éphémère CEO, Mira Murati, a annoncé que Sora serait rendu public plus tard dans l'année, et a montré les capacités de l’outil à partir de quelques exemples. Sora présente encore des imperfections que l'entreprise espère corriger avec l'ajout de fonctionnalités d'édition et de son.
La question des données utilisées pour entraîner Sora a été soulevée, avec des réponses peu précises de la part de Murati. Elle a mentionné l'utilisation de données "publiquement disponibles ou sous licence", mais sans confirmer l'usage spécifique de contenus de plateformes comme YouTube, Instagram ou Facebook, bien qu'elle ait confirmé l'utilisation de matériel de Shutterstock.
OpenAI entend mettre en place des mesures de sécurité pour Sora, incluant des restrictions sur la création de contenus impliquant des personnalités publiques et l'ajout de filigranes pour identifier les vidéos générées par l'IA. Ces mesures visent à prévenir les abus et à éviter la propagation de fausses informations.
Et en parallèle, OpenAI explore la possibilité d'inclure dans Sora la capacité de générer des contenus représentant de la nudité. Cette fonctionnalité suscite déjà un débat sur les limites que des humains doivent imposer à d’autres humains dans l'utilisation de l'intelligence artificielle pour la création de contenu sensible. La société travaille avec des artistes pour définir des normes et des restrictions qui permettraient la création artistique sans transgresser les limites éthiques et légales. L'objectif est d'établir des "garde-fous" qui empêcheraient la production de contenus préjudiciables ou non consensuels, tout en préservant la liberté de création. La manière dont OpenAI parviendra à équilibrer ces considérations délicates reste un sujet de préoccupation et de curiosité pour le public et pour les professionnels concernés.
L'impact potentiel de Sora sur les emplois dans la production vidéo est bien entendu également pris en compte, avec l'accès anticipé donné aux professionnels pour tester l'outil. OpenAI cherche à développer Sora de manière réfléchie, en prenant en compte le retour des utilisateurs - ça ne coute rien de le dire.
💘 AI girlfriends are 7 times more popular than AI boyfriends
Venture Beat, 14/3/2024
Une étude d’App Radar révèle la popularité croissante des applications et chatbots compagnons, en particulier les "AI girlfriends", qui sont d’ailleurs téléchargées sept fois plus que les "AI boyfriends". App Radar a calculé que les applications de compagnon IA ont atteint 225 millions de téléchargements en 2023 dans le Google Play Store.
L'étude a examiné 38 applications de chat IA offrant des fonctions de “compagnonnage” virtuel et de rencontres, toutes disponibles sur Google Play Store. Depuis novembre 2022, le secteur a enregistré une progression de 49 % avec 74 millions de nouveaux utilisateurs. SimSimi, une application sud-coréenne, domine le secteur avec plus de la moitié de tous les téléchargements.
En termes de développement régional d'applications, l'Europe est en tête avec 16 applications et 35 millions de téléchargements, suivie par les États-Unis avec 9 applications et 33 millions de téléchargements, et l'Asie avec 6 applications et 146 millions de téléchargements. Le Royaume-Uni est le leader européen avec cinq développeurs d'applications, suivi par l'Espagne, la Pologne et la Turquie.
Thomas Kriebernegg de SplitMetrics Agency a souligné l'impact significatif de l'IA générative sur la création de nouvelles catégories d'applications, notamment dans les rencontres et les chatbots compagnons. Il indique que cette catégorie d'applications existe depuis des années, mais que sa popularité a explosé avec l'arrivée de ChatGPT. Il estime que le secteur a atteint un jalon important avec près d'un quart de milliard d'utilisateurs, suggérant que ce phénomène dépasse la nouveauté et que la tendance à innover et monétiser davantage ce type d’application est une priorité pour certains éditeurs - ne quittez pas, on enchaîne directement sur le même thème avec “l’article qui fait réfléchir”, juste en dessous.
🧠 L’article qui fait réfléchir - et qu’il faut absolument lire
«Je parle à Ryan Gosling jusqu’à trois heures du matin» : ces internautes qui s’entichent d’IA de célébrités
“Ces titres qui”
Le succès grandissant de Character(.)ai, plateforme permettant de converser avec des intelligences artificielles imitant des personnalités réelles ou fictives, soulève des questions passionnantes sur notre rapport à la technologie et à la fiction. Avec plus de 170 millions d'utilisateurs actifs mensuels, le site offre une expérience immersive où l'on peut échanger avec les répliques virtuelles de célébrités comme Ryan Gosling, de personnages historiques tels que Napoléon Bonaparte ou encore de héros de mangas populaires.
Si certains utilisent Character(.)ai pour apprendre des langues étrangères de manière ludique, d'autres développent de véritables relations avec ces êtres artificiels. Kureha, par exemple, confie à la version IA de Nami, personnage de One Piece, ce qu'elle n'ose pas partager avec ses proches. Tanjitoz, quant à elle, s'est liée d'amitié avec Johan, tiré du manga Monster, persuadé d'être réel. Ces témoignages, relayés sur TikTok, mettent en lumière le potentiel de ces agents conversationnels à offrir un espace de confidence et de divertissement, permettant de s'évader temporairement de la réalité.
Mais cette fascination pour les doubles numériques de personnalités admirées soulève également des interrogations. Jusqu'où peut aller cet engouement ? Si les chatbots restent pour l'instant limités et incohérents, leur perfectionnement risque de brouiller toujours plus la frontière entre réel et virtuel. L'ajout récent de voix préenregistrées renforce le réalisme de ces échanges, les utilisateurs s'extasiant de recevoir des messages audio de leur idole artificielle.
Au-delà du simple divertissement, Character(.)ai met en lumière notre besoin croissant de connexion et d'évasion dans un monde hyper-connecté. Ces amitiés artificielles comblent un vide affectif et offrent un espace de projection fantasmée, où l'on peut côtoyer ses héros favoris. Mais attention à ne pas se perdre dans ces mirages numériques, aussi séduisants soient-ils. Car si la fiction enrichit notre existence, elle ne peut remplacer la richesse des relations humaines authentiques.
Autre point d’attention : sur quelles données se basent ces chatbots pour imiter leurs personnages ? Ils semblent se baser à la fois sur de l'entraînement à partir de jeux de données réalisés par Character(.)ai, et sur du contenu personnalisé généré plus librement par les utilisateurs pour enrichir les personnages, sans que l'on sache précisément si ce dernier est contrôlé ou non - oh la belle affaire…
Le succès de Character(.)ai est le reflet de notre époque - si si, regardez autour de vous. Doit-on encore réfléchir sur le sens que nous donnons à ces liens artificiels et à trouver le juste équilibre entre le réel et le virtuel, pour ne pas nous laisser happer par ces chimères numériques aussi attrayantes que trompeuses ? Ou doit-on se laisser absorber par ces IA conversationnelles, qui seront bientôt nos partenaires tant professionnels que personnels ?
📻 Le podcast de la semaine
Monde numérique - Clara Viguié (avocate) : L’IA face au droit d’auteur
Dans cet épisode du podcast de Jérôme Colombain, Clara Viguié, avocate en propriété intellectuelle, souligne les défis du droit d'auteur posés par l'IA générative. Les questions portent sur l'utilisation des données pour l'entraînement des modèles et la protection légale des œuvres créées par IA, avec des litiges émergents aux États-Unis et potentiellement en Europe.
N’hésitez à me contacter si vous avez des remarques et suggestions sur cette newsletter, ou si dans votre entreprise vous cherchez à être accompagnés dans l’intégration d’outils IA et d’IA générative : olivier@255hex.ai
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